Les Bread and Puppets, c’est un groupe de théâtre de rue actif depuis les années 60. Ce collectif s’est fédéré autour de Peter Shuman, sculpteur, danseur et boulanger. Les pièces et performances qu’iels donnent à voir contiennent toujours une critique sociale, iels prônent l’anti-militarisme, l’anti-capitalisme et l’écologie.
Leurs slogan « des marionnettes et du pain » est aussi une pratique : iels entretiennent une souche de levain depuis leurs débuts et partagent ce pain, chaque jour créé avec les spectateurices. Leur manifeste scande: « L’art, c’est presque comme le pain, ça ne se mange pas mais ça nourrit. ».
L’art n’a pas à être endigué dans les musées, il n’a pas à être le privilège d’une élite, il est le bien commun de tou.te.s. Pour elleux, l’art doit être « cheap » : pas cher, pas snob, pas brillant. Iels revendiquent une expérimentation permanente qui conduit souvent à une incomplétude, un travail inachevé, inabouti, « inesthétique » mais peu importe puisque c’est ce mouvement d’expérimentation, accessible à tou.te.s qui les intéresse.
Dans cette perspective de valorisation de l’imparfait et de ce qui peut être fait ensemble, le papier mâché est le matériel le plus approprié : on ne peut pas être lisse ou rechercher la perfection et c’est un matériel pas cher, facile à manipuler donc accessible à tou.te.s.
Ayant beaucoup de points communs avec les Bread and Puppets, les Fileuses ont profité d’une de leur résidence à Paris pour se former à la marionnette géante et la mise en scène. Nous y avons construit une femme-oiseau – symbole de la femme savante – pour manifester notre volonté d’un système écologique, féministe et antiraciste.
Son hybridation avec l’animal lui offre une connexion privilégiée avec la nature : elle communique avec les autres oiseaux et connaît l’état des forêts et des sols. La femme-oiseau n’a pas de race, elle est partie intégrante du règne végétal et animal dans un geste immanent. Elle est porteuse d’un savoir ancestral : celui de savoir observer et écouter la nature pour savoir ce qui soigne, ce qui nourrit, ce qu’il faut laisser en jachère. Ses ailes lui permettent de voler et prendre de la hauteur par rapport à la communauté des hommes préoccupée par le progrès, la raison et la transcendance.
Son murmure et son vol nous invitent vers un monde alternatif.